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Emissions de Radio & L'Histoire - Le Moyen Age

Inspiration et Réflexion

 

 

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        SOMMAIRE

 

      1- L'Histoire

      2- L'Antiquité

      3- Le Moyen Age

      4- Le 16e Siècle

      5- Le 17e Siècle

      6- Le 18e Siècle

      7- Le 19e Siècle...

      8- Le 20e Siècle

      9- Le 21e Siècle...

    10- La Prospective

 

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- Pour écouter l'émission  de radio Planète Féministe, vous pouvez cliquer sur le lien ci-dessous ou aller sur la page "Ecouter l'émission" de ce site

 https://audioblog.arteradio.com/blog/182081/emission-de-radio-planete-feministe#

 

L'Histoire

 

 

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Le Moyen Age

 

 

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                      Vitrail d'une église en Ecosse

 

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Tidiane N'Diaye, anthropologue, est l'auteur de "Le génocide voilé. Enquête historique" (Gallimard, 2008)    

 

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               Sandro Botticelli, Vierge à l'Enfant, 15e siècle

 

     

                                                      

 

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           Eléonore ou Aliénor d'Aquitaine (1122/24-1204)

 

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             Marie de France, la poétesse (1160-1210)                                 

                                 

 

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1995 est l'année où je commence la radio alors même que l'historienne féministe Florence Montreynaud publie « Le XXe siècle des femmes (Nathan)», un ouvrage ambitieux et volumineux qui raconte l'histoire des femmes, du début du 20e siècle à 1994 en offrant un nombre considérable d'informations, de dates marquantes, de figures féminines et féministes qui ont joué un rôle considérable, à travers le monde entier. Initiative et entreprise colossales, ô combien fondamentales et réussies. Parallèlement à cela, la même année, l'historien médiéviste Georges Duby, professeur au Collège de France et membre de l'Académie française, fait paraître le premier volume des « Dames du XIIe siècle. Héloïse, Aliénor, Iseut et quelques autres (Gallimard)».

L'historien rappelle que l'Europe du 12e siècle a découvert l'amour profane en même temps que l'amour mystique, le tout accompagné de tourments importants. Dans les cercles raffinés de la noblesse qui perdaient un peu de leur brutalité, la question de l'amour, y compris l'amour physique, la place faite au désir et à son assouvissement se sont posées avec acuité, principalement au départ, dans le nord-ouest de la France, l'une des régions les plus évoluées.

La politique familiale au sein des dynasties aristocratiques privaient beaucoup d'hommes adultes de femmes légitimes en raison du refus de fractionner le patrimoine lors des successions.

Nombre d'entre eux rêvaient alors d'avoir une épouse et guettaient avec impatience l'occasion. Georges Duby précise que : « Guillaume Maréchal, le modèle du chevalier, était encore célibataire à près de cinquante ans, et la plupart de ses compagnons le restèrent jusqu'à leur mort… En un temps où les structures politiques se renforçaient, où les princes s'évertuaient à domestiquer la chevalerie, à la maintenir en paix, réunie autour d'eux dans leur cour, dans ces grandes assemblées mondaines remplies justement de femmes, de proies tentantes, une telle presse de poursuivants, fougueux ou sournois, autour des dames et des demoiselles, était un facteur de désordre qu'il importait de contenir par tous les moyens.».

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Alors que l’Église imposait la continence au clergé, elle réservait la sexualité au cadre stricte de la conjugalité. Comment faire si seul le mariage rendait possible le défoulement sexuel alors qu'il était refusé à un nombre non négligeable d'hommes ? Comment dépasser cette tension et cette contradiction ? Comment canaliser l'énergie sexuelle ?

La littérature composée pour la société de cour en langue romane, en «roman», avait un rôle pédagogique en transmettant une morale que propageaient les princes mécènes qui soutenaient les poètes. Il s'agissait alors de faire rêver à travers la mise en scène de héros porteurs de valeurs et de sentiments «nobles».

L'exemple des chevaliers de la Table Ronde et leur amour envers une femme fut imité tellement le lyrisme médiéval chantant la «fine amour» passionnait dans sa façon d'agir, de penser et de sentir. A cet égard, les légendes issues du monde celtique ont captivé l'attention de nombre de femmes et d'hommes du Moyen Age car elles dépaysaient, surprenaient, enivraient, évoquaient un ailleurs mystérieux et surtout un amour irrésistible, un amour sauvage accompagné de désir fou qui devaient parler inconsciemment et consciemment à beaucoup.

D'où la puissante attraction envers l'histoire légendaire de Tristan et Iseut, qui a traversé les siècles avec succès et le même amour pour l'amour, la même passion pour la passion et la même séduction pour la séduction. Peut-être que vous aussi qui lisez cette page, êtes charmé/es par la légende.

 

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Le poème Initium de Verlaine décrit le commencement d'une passion, d'un attrait pour une personne et ce qui se trame dans l'entremêlement de la raison et du sentiment. Cette description poétique pourrait correspondre aux premiers émois qui saisissent Tristan et Iseut.

L'ivresse des sens survient en regardant, en buvant des paroles ou un philtre puissant.

 

" Initium

 

Les violons mêlaient leur rire au chant des flûtes

Et le bal tournoyait quand je la vis passer

Avec ses cheveux blonds jouant sur les volutes

De son oreille où mon Désir comme un baiser

S'élançait et voulait lui parler sans oser…

 

Et depuis, ma pensée - immobile – contemple

Sa splendeur évoquée, en adoration,

Et dans son Souvenir, ainsi que dans un temple,

Mon Amour entre, plein de superstition.

 

Et je crois que voici venir la Passion."

 

        

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Si aucun récit légendaire n'a de signification intemporelle en soi car celle-ci peut évoluer au gré des époques, des lieux et des vécus de chacun/e, il n'en demeure pas moins que l'histoire celtique et mythique de Tristan et Iseut reste avant tout un texte subversif au Moyen Age, en ce sens qu'il bouleversait un certain ordre social et seigneurial établi ainsi que les représentations entre les sexes pour ce qui a trait aux désirs féminin et masculin.

 

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               Iseut La Blonde versus Iseut aux Blanches Mains

Pourquoi avoir appelé l'épouse non désirée de Tristan, Iseut aux blanches mains, du même prénom que la véritable héroïne de la légendaire histoire celtique médiévale, à savoir Iseut La Blonde - avec la nécessité de préciser l'une de leurs caractéristiques physiques ou personnelles afin de les distinguer sans les confondre ?

A cela, deux raisons : la première consiste à mettre en lumière la position de seconde, de remplaçante, de succédané, d’ersatz, alors qu'Iseut (La Blonde) demeure irremplaçable et inoubliable pour Tristan.

C'est pourquoi la deuxième raison, découlant de la première et de cet état de fait, évoque en filigrane l'Imitation jalouse ou la Jalousie imitative d'une femme qui se sent méprisée ou mal aimée, et qui dès lors se transforme en rivale en enviant celle qui occupe une position de Référence. La résignation sentimentale de Tristan et sa frustration amoureuse aggravent celles de cette seconde Iseut aux blanches mains qui sait d'emblée qu'elle n'est pas et ne sera jamais l'élue. D'où sa vengeance à travers le mensonge pour faire souffrir fatalement Tristan au risque de le voir succomber.

Si le film Tristan & Isolde de Kevin Reynolds sorti en 2006, évince ce personnage féminin très secondaire, jugé mineur et qui fait peut-être pâle figure dans le récit légendaire de Tristan et Iseut, en jouant néanmoins un rôle fatidique, la question de la place de la seconde - celle qui envie une autre femme, se compare à elle, celle qui occupe un moindre intérêt, celle qui exerce peu d'attrait ou une moindre importance aux yeux d'autrui ou de la société -, n'en demeure pas moins cruciale et déterminante dans l'évolution historique du statut des femmes tant dans la littérature occidentale que dans la réalité.

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J'ai abordé cette thématique fondamentale dans l'histoire des femmes, à savoir le «complexe de la seconde», en invitant à la radio en avril 1999, Nathalie HEINICH, sociologue au CNRS, pour son passionnant ouvrage États de femme, l’identité féminine dans la fiction occidentale (Gallimard, 1996).

Après avoir lu deux cent cinquante œuvres classiques, du 18e siècle au 20e siècle, des romans, des contes, des nouvelles, des pièces de théâtre, l'auteure étudie l'évolution de l'identité féminine à travers la fiction occidentale selon, ce qu'elle appelle des «États de femmes» qui correspondent concrètement à une situation civile de jeune fille, d'amante, d'épouse, de mère, de célibataire, en analysant précisément la place ou l'absence de place qu'occupent ces femmes, leur position de première ou de seconde place, majeure ou mineure, importante ou méprisée.

Les exemples fourmillent, qu'il s'agisse des nymphes, des amazones, des épouses de Dieu, de femmes promises ou compromises, de la première souveraine, de la précédente, de la seconde, de la remplaçante, d'épouses soumises ou frondeuses, de veuves joyeuses, malheureuses ou dangereuses, de femmes bannies, de femme unique, de la Dame, de femmes légitimes ou marginales, de courtisanes avilies, de filles perdues ou dévotes, ou encore de femmes savantes.

A travers chaque cas, sont évoqués de nombreux autres thèmes comme la vertu, le soupçon, la loi de l'amour, la loi du père, l'indifférence, la haine, la soumission, la déception, la création, la procréation, le drame du renoncement, la résignation, la possession, la manipulation, le fantasme, le sacrifice, la folie, le suicide, la fuite, l'abîme, le symptôme du fantôme, l'absence, la liberté et l'errance, et l'articulation entre écriture et indépendance.

Vaste panorama, s'il en est, accompagné de riches analyses et d'éclairages lumineux sur notre condition humaine, pas toujours brillante.

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L'historien Alain Corbin, dans son livre «Les Filles de rêve», se demande ce que l'on sait de l'apparence enchanteresse d'Iseut ? Il souligne que Denis de Rougemont dans son œuvre majeure intitulée «L'Amour en Occident» décrit la figure d'Iseut comme un «symbole d'amour lumineux». Iseut, destinée à demeurer à jamais fille de rêve, aurait, selon Denis de Rougemont, inspiré plusieurs figures féminines littéraires comme Béatrice de Dante, Laure de Pétrarque, Juliette de Shakespeare.

Le roman de Béroul mêle la légende celtique au code de l'amour courtois et définit Iseut par la blondeur radieuse de sa chevelure et la clarté de son teint «la blonde Iseut au clair visage», par un «corps harmonieux» et des «yeux brillants».

Alain Corbin ajoute que l'influence des légendes celtiques aurait conduit à survaloriser la fascination de la nuit et de la mort et précise «ce que Richard Wagner, avec génie, a poussé au plus profond dans son sublime opéra».

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La légende de Tristan et Iseut/Iseult/Yseult/Isolde traverse les siècles. La littérature, la peinture, la sculpture, la musique, le cinéma et même le dessin animé se sont emparés de cette histoire légendaire.

 

     

 

 

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La légende de Tristan et Iseut, plus encore que celle de Lancelot et Guenièvre, se confond avec l'histoire d'un amour torturant. Un amour qui a marqué au fer rouge notre imaginaire. Ce conte brûlant hérité des terres du Nord a dépassé le théâtre de son action – les îles d'Angleterre et d'Irlande – pour rayonner dans tout l'Occident. Sans doute parce que, pour la première fois, la passion charnelle, réprouvée par les Grecs, les Romains, les Germains, est célébrée dans toute son âpreté…

Le mythe exprime aussi profondément l'idée que les liens du sexe sont plus forts que ceux du sang…Tristan et Iseut ont bu le philtre, ils doivent s'aimer… Cette passion charnelle est tout sauf un feu de paille. Elle marque la naissance de la mystique du couple, de l'amour indestructible, éternel…

Tristan et Iseut ne cessent d'être séparés, mais ils surmontent tous les obstacles pour se retrouver, encore et encore…

Une telle image ne peut que séduire, frapper l'imagination et convertir à la mystique de l'amour passionné. L'histoire de Tristan et Iseut traduit et renforce un important mouvement. Un renversement culturel s'opère. La mystique du couple indestructible deviendra peu à peu un idéal, un horizon à atteindre pour tous.


Fabienne Casta-Rosaz, Historie de la sexualité en Occident, Émission Planète Féministe, N° 149, réalisée le 07 décembre 2004

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L'amour de Tristan et Yseult, l'amour passion, quelles qu'en soient l'évidence et la force, ne s'inscrivait pas dans l'ordre des choses...

Cet amour surgit, inattendu, il bouleverse un scénario qui ne lui faisait pas de place, et la violence de son irruption ne pourra avoir raison du monde comme il va. Yseult n'était pas promise à Tristan, mais l'amour impossible en ce monde semble malgré tout plus vrai que lui...

Comme s'il s'agissait de rappeler que l'élan d'un être vers un autre ne se commande pas, ne se prévoit pas. Avènement exemplaire d'un imprévisible destin, d'une passion sans ancrage dans les calculs quotidiens.

Henri Pena-Ruiz, Grandes Légendes de la pensée, Emission Planète Féministe N° 184, réalisée le 03 janvier 2006    

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L'essence même de l'amour se trouvait là sa figure et son récit. Vivant séparés comme les deux moitiés de l'androgyne, Tristan et Yseult, Yseult et Tristan, n'ont de cesse que de s'unir à nouveau. Morts, ils donnent naissance au rosier et à la vigne, aussitôt entrelacés, au chèvrefeuille et à la ronce, dont les volutes se mélangent comme naguère les courbes de leur corps abandonnés aux joies tragiques de l'amour...

Ainsi, d'une même coupe, se conçoit un type d'union qui surmonte et qui dépasse la différence des êtres sans la supprimer. L'amour ne dissout pas les identités. Même dans la figure fusionnelle qu'incarnent Yseult et Tristan. Tristan et Yseult restent eux-mêmes tout en ne formant qu'un. Thomas Mann dira : “Le toi et le moi, le tien et le mien, réunis pour toujours dans un bonheur sublime.”

Henri Pena-Ruiz, Grandes Légendes de la pensée, Emission Planète féministe N°184, réalisée le 03 janvier 2006

 

     

Autant les fabliaux érotiques se montrent très irrespectueux à l'égard des dames, autant l'amour courtois les met sur un piédestal…

C'est « un jeu d'hommes », souligne le médiéviste Georges Duby… Il permet aux chevaliers de se perfectionner en se mettant en danger, de rivaliser d'adresse et de courage…

La fin'amor du XIIe siècle, toute littéraire et fantasmatique qu'elle est, a instauré un contre-modèle aux mœurs médiévales. Elle marque une véritable rupture dans l'histoire de l'amour et de la sexualité…

Dans le contexte du Moyen Age, où les femmes sont quotidiennement violentées, dominées, surveillées, ce principe relève de la subversion. Il amorce un mouvement profond de redéfinition des rapports hommes-femmes, qui se poursuivra dans la « civilisation des mœurs » de la Renaissance, dans la préciosité du XVIIe siècle, dans le féminisme des XIXe et XXe siècles…

Fabienne Casta-Rosaz, Historie de la sexualité en Occident, Émission Planète Féministe, N° 149, réalisée le 07 décembre 2004                                            

      

L'impact de l'amour courtois sur l'imaginaire occidental et l'empreinte qu'il a laissé dans la mémoire collective s'expliquent aussi par l'érotisme qu'il a insufflé dans les relations sentimentales… l'amour courtois découvre ainsi, ou redécouvre, l'érotisme, cet art de l'attente, du dévoilement progressif, de la suggestion, de l'imagination…

L'amour courtois ne reste pas toujours, d'ailleurs, aussi chaste qu'on imagine. Il peut se réaliser à travers des jeux érotiques savamment graduels et passionnés…

Parfois même, le désir est comblé. Lancelot, ce champion aux armes noires qui participe à la quête du Graal et incarne l'idéal chevaleresque et courtois, est soutenu dans ses exploits par le désir de conquérir la reine Guenièvre, femme du roi Arthur. Et il y parvient…

Le seul voile dont doit dès lors s'entourer leur amour est celui de la discrétion.

Fabienne Casta-Rosaz, Historie de la sexualité en Occident, Émission Planète Féministe, N° 149, réalisée le 07 décembre 2004

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          Moyenage

 

  

            Tristan & Yseult, film de kevin Reynolds, 2006

                          

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         La mort de la belle Aude, miniature, 14e siècle

 

    

 

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                              Venise au Moyen Age

 

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L'Amour mène la danse. "Le Roman de la Rose" de Guillaume de Lorris et Jean de Meung, miniature, 14e siècle.

Le songe n'est pas un mensonge. Il renvoie parfois à un rêve poétique qui peut devenir prophétique. L'art d'aimer à travers le lyrisme médiéval en offre un exemple majeur qui a donné naissance au célèbre « Roman de la Rose » de Guillaume de Lorris. Cette œuvre maîtresse du Moyen Age a exercé une immense influence à travers les siècles et demeurent sans doute une référence pour tout ce qui a trait à l'allégorie, la poésie, l'état d'esprit courtois, l'amour, l'écoulement du temps, l'exaltation des sentiments, l'embellissement, le tout dans un environnement ou un décor champêtre où la floraison et les cycles saisonniers jouent le rôle de support, de miroir et d'analogie.

 

L'histoire du  Moyen Age occidental est une histoire principalement religieuse chrétienne, tout passe par le filtre du catholicisme en particulier, du berceau à la tombe. Marie est une figure féminine qui est vénérée, implorée, chantée, certes en tant que mère, mais sa place demeure essentielle. Le prénom Marie, choisi au départ en référence à cette femme iconique, traverse les siècles et les continents.

Jacques Dalarun, directeur de recherches au CNRS, écrit à propos du culte envers Marie, dans le tome 2 de " Histoire des femmes en Occident. Le Moyen Age", (sous la direction de Georges Duby et Michelle Perrot) que :

"Le XIIe siècle, on l'a répété à l'envi, fut le grand siècle de l'essor marial, le printemps des cathédrales ; le plein temps de "Notre-Dame" ; essor visible mais qui se nourrit, comme le souligne Jean Leclercq, des innovations venues du XIe siècle, celui de la plus vive fermentation mariale. Entendons bien : nos sources l'attestent, des hommes - ici Marbode, Geoffroy - ont fervemment prié Marie, lui ont confié leurs fautes les plus inavouables, lui ont dédié leurs poèmes ; ou encore - Geoffroy, Hildebert -, ont médité sur le mystère de son exception. "Seule, sans exemple, vierge et mère Marie", comme l'affirment divers recueils carolingiens. C'est dire d'emblée que louer la Vierge-Mère n'est nullement rendre hommage à l'ensemble de ses plus modestes consœurs, comme l'avait fort justement pressenti Jules Michelet.

 

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Dans l'ouvrage "Il était une fois... l'histoire des femmes" (éditions Lunes) qui met en lumière un dialogue qui s'est instauré entre Michelle Perrot et deux adolescentes Héloïse et Oriane, l'historienne établit une double analogie entre Marie et Marianne, en évoquant la République et les citoyennes : celle du symbole et celle du prénom.

Elle souligne ainsi en évoquant la Seconde République (1848-1851) que : "tandis que les femmes concrètes sont absentes de l'exercice de la politique, une Femme abstraite incarne la démocratie. On peut faire une comparaison avec ce qui se passe dans les églises, notamment catholiques. Seuls les hommes sont prêtres et pourtant on voit partout des statues, des autels de la Vierge qu'on vénère. Dans l’Église catholique, des prêtres au Pape, le pouvoir appartient aux hommes ; et la Vierge Marie, qui n'est ni dieu ni prêtre, plane au-dessus d'eux. La puissance de Marie, comme celle de Marianne, la République, est de l'ordre du symbolique."

Michelle Perrot précise ensuite que : " "Marie-Anne" était un prénom très populaire, aux 18e et 19e siècles ; il unissait les prénoms de la Vierge (Marie) et de sa mère (Anne). D'où le fait qu'on l'ait choisi pour nommer la République, fille du Peuple, au début de manière familière, voire moqueuse. Personne n'a vraiment décidé ce baptême. C'est un usage qui s'est imposé d'abord dans le Midi, autour de 1850. C'est la Troisième République qui l'a officiellement adopté, en même temps qu'elle érigeait des statues pour représenter la République".

 

Marie à l’Église et Marianne à la Mairie. Marie et Marianne - ayant chacune, un prénom qui a une base commune -, constituent une puissance symbolique perceptible dans les œuvres d'art comme la peinture et la sculpture.

 

  

Dans le beau livre "Images de femmes" (sous la direction de Georges Duby, Plon) Chiara Frugoni, professeure à l'université de Rome II, montre que les sentiments humains s'expriment à travers la représentation du culte marial : "ce sont les innombrables expressions de l'affection maternelle sur des centaines de Vierge à l'Enfant, susceptibles de parcourir tous les degrés de la tendresse, de l'attention et aussi de l'inquiétude qui, sous les couleurs de la mélancolie, laisse présager la crucifixion et la mort à venir. Il va sans dire que la répétition obsessionnelle du thème mère-fils a entretenu pendant des siècles l'idée d'une "vocation maternelle" de la femme".

Ce qui est peut-être le plus intéressant socialement et psychologiquement parlant, au sujet de cette multitude de représentations imagées, c'est l'explication que Chiara Frugoni donne à ce besoin et à cette ferveur artistiques, en ajoutant que : " Tout aussi mystérieux est le mécanisme psychique - un authentique retour du refoulé - par lequel l'image de la femme finit par devenir le moyen privilégié d'exprimer une ample série de dispositions mentales historiquement interdites à l'homme : le désespoir, la tendresse, la fatigue, l'angoisse, la pudeur, le rire ; le code social ne permettait pas à l'homme de s'y laisser aller et elles trouvent sur le visage des femmes la voie pour détourner la censure. On voit ainsi prendre forme et matière de langage des émotions qui autrement seraient probablement restées muettes."

 

Il en va peut-être ainsi aussi pour des figures féminines héroïques, mythiques, fictifs, symboliques comme Jeanne d'Arc, Marianne et les nombreux personnages littéraires de roman et de poésie. D'où le besoin voire la nécessité pour certaines femmes et certains hommes, de se passionner pour le monde de l'art, lieu à la fois du sensible et de l'intelligible.

 

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Hildegarde de Bingen (1098-1179), femme de lettres, compositrice, religieuse mystique

 

 

 

     

 

 

 

 

 

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           L'Abbaye de Royaumont construite entre 1228 et 1235

 

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L'important dans la vie consiste peut-être à apporter sa pierre à l'édifice, mais pas n'importe lequel, celui qui donne du sens à l'existence et ravit nos sens.

En tout cas, c'est ce que Christine de Pizan imaginait à travers son œuvre du XVe siècle, La Cité des Dames. Ci-dessous, on peut voir l'enluminure de son manuscrit où il s'agit de bâtir et de construire cette fameuse Cité.

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«… C’est à toi entre toutes les femmes que revient le privilège de faire et de bâtir la Cité des Dames. Et, pour accomplir cette œuvre, tu prendras et puiseras l’eau vive en nous trois, comme en une source claire ; nous te livrerons des matériaux plus durs et plus résistants que n’est le marbre massif avant d’être cimenté. Ainsi ta Cité sera d’une beauté sans pareille et demeurera éternellement en ce monde.

Tu as lu, en effet, comment le roi Tros fonda la grande cité de Troie avec l’aide d’Apollon, de Minerve et de Neptune (que les anciens prenaient pour des dieux), et comment Cadmus fonda la ville de Thèbes sous l’injonction divine ; mais toutefois, avec le temps, ces villes s’écroulèrent et tombèrent en ruine. Mais moi, sibylle véritable, je t’annonce que jamais la Cité que tu fonderas avec notre aide ne sombrera dans le néant ; elle sera au contraire à jamais prospère, malgré l’envie de tous ses ennemis ; on lui livrera maints assauts, mais elle ne sera jamais prise ni vaincue.

L’histoire t’enseigne que le royaume d’Amazonie fut autrefois établi grâce à l’initiative de nombreuses femmes fort courageuses qui méprisaient la condition d’esclave. Elles le maintinrent longtemps sous l’empire successif de différentes reines : c’étaient des dames très illustres qu’elles élisaient et qui les gouvernaient sagement en conservant l’Etat dans toute sa puissance. Du temps de leur règne, elles conquirent une grande partie de l’Orient et semèrent la panique dans les terres avoisinantes, faisant trembler jusqu’aux habitants de la Grèce, qui était alors la fleur des nations. Et pourtant, malgré cette force et cet empire, leur royaume – comme il en va de toute puissance – finit par s’écrouler, de sorte que seul le nom en survit aujourd’hui....»

La Cité des Dames (1405), Christine de Pizan

 

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  Sandro Botticelli amoureux de Simonetta Vespucci (1453-1476)

Le visage de Simonetta se confond avec celui d'Aphrodite/Vénus    

 

 

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       Sandro Botticelli (1445-1510), Vénus et Mars (1482/1483)

 

Que pensez-vous de cette idée ?

" L'oeuvre est un lieu de rencontre, de dialogue, où venir se charger d'énergie, ou se délivrer d'un trop-plein." de Charles Juliet, Traversée de nuit (Journal II- 1965-1968) (éditions P.O.L)

 

  

L'histoire mythologique nordique "Siegfried et la Reine d'Islande Brunehilde" du XIIIe siècle ressemble un peu à la légende celtique de "Tristan & Iseut" sans s'y réduire ni s'y confondre pour autant. Brunehilde est une reine guerrière contrairement à Iseut.

   

 

 

      

 

     

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